Le système des retraites français fait aujourd’hui face à un enjeu de taille concernant le versement des pensions à l’étranger. Un rapport récent de la Cour des comptes révèle l’existence de fraudes préoccupantes, notamment au Maroc et en Algérie. Les autorités appellent désormais à renforcer les contrôles pour protéger l’intégrité de notre protection sociale.
Fraudes aux pensions de retraite à l’étranger : un phénomène inquiétant
Dans son rapport, la Cour des comptes met en lumière plusieurs irrégularités dans le versement des pensions hors du territoire français. Trois pratiques frauduleuses ressortent particulièrement : l’usurpation d’identité, le non-signalement d’un départ définitif de France, et la non-déclaration de décès, qui permet de continuer indûment à percevoir une pension.
Ces fraudes, souvent difficiles à repérer quand elles sont commises depuis l’étranger, coûtent plusieurs millions d’euros chaque année à la sécurité sociale. La Cour des comptes insiste sur l’urgence de renforcer les moyens de détection et de sanction pour éviter que ces abus ne menacent l’équilibre financier du système de retraite.
Une mission de contrôle menée par la police aux frontières en 2022, sur 2 500 dossiers examinés entre 2019 et 2022, a révélé que plus de 2 % présentaient des documents irréguliers ou incomplets. Ce chiffre, qui peut sembler faible, cache en réalité de fortes disparités selon les zones géographiques concernées.
Maroc et Algérie : une surreprésentation statistique notable
L’analyse plus précise des fraudes montre une concentration marquée dans certaines régions, en particulier au Maghreb. Les dossiers liés au Maroc et à l’Algérie apparaissent surreprésentés par rapport à leur part dans l’ensemble des pensions versées à l’étranger. Selon le rapport, cette disproportion est suffisamment significative pour justifier des contrôles plus ciblés.
Par exemple, même si le Maroc ne représente qu’une petite part des dossiers globaux, il concentre une part bien plus importante des anomalies. L’Algérie est également pointée du doigt pour le nombre de cas signalés. D’ailleurs, la majorité des retraités français vivant à l’étranger sont concentrés dans un petit nombre de pays : l’Algérie, le Maroc, mais aussi la Tunisie, le Portugal, l’Espagne, l’Italie et la Belgique. Cette répartition géographique facilite la mise en place de contrôles efficaces, car les autorités peuvent prioriser leurs efforts sur les zones les plus sensibles.
Stratégies de contrôle et coopération internationale
Face à l’ampleur des détournements possibles, des actions concrètes ont déjà été lancées. Entre 2020 et 2023, plusieurs campagnes de vérification ont été menées sur le terrain, avec la convocation de milliers de retraités pour vérification. Plus de 2 500 bénéficiaires au Maroc et environ 4 000 en Algérie ont ainsi dû prouver leur situation réelle.
La Cour des comptes recommande désormais d’aller plus loin en renforçant la coopération entre administrations françaises et étrangères. L’objectif est de généraliser les échanges de données d’état civil pour repérer plus rapidement les anomalies, mais aussi d’améliorer les procédures de signalement des décès afin d’éviter les versements indus.
Harmoniser les bases de données administratives figure aussi parmi les priorités. Une meilleure synchronisation permettrait de déceler plus facilement les incohérences dans les dossiers et de limiter les failles exploitées par certains fraudeurs.
Ces recommandations s’inscrivent dans une volonté globale de garantir l’équité et la bonne gestion des fonds publics. Dans un contexte budgétaire déjà tendu, protéger le système de retraite est essentiel pour que chaque pension soit versée à son véritable ayant droit. C’est aussi un moyen de préserver la confiance des citoyens dans la solidarité nationale et d’assurer la pérennité d’un système qui bénéficie à tous.