Vendredi 13 juin à 21h10, France 3 diffusait « Famille, je vous aime », une nouvelle émission imaginée par Michel Drucker autour des liens familiaux. L’occasion pour l’animateur emblématique de livrer, dans les colonnes de Ciné-Télé-Revue, une rare confidence sur son père, Abraham Drucker.
« Je suis ashkénaze, mon père était un homme d’une force incroyable. À 80 ans, atteint d’un cancer, il a encore réalisé un accouchement… six jours avant sa mort. »
Un témoignage bouleversant, à l’image de la vie hors du commun d’un homme qui a profondément influencé le parcours du célèbre animateur normand.
Abraham Drucker : un médecin hors norme, enraciné en terre normande
Né en 1903 à Davideni, dans une région aujourd’hui ukrainienne, Abraham Drucker arrive en France en 1925 après avoir entamé des études de médecine à Bucarest. Son diplôme étranger n’étant pas reconnu, il recommence sa formation médicale depuis le début et soutient sa thèse en 1936.
Il s’installe ensuite comme médecin généraliste à Saint-Sever-Calvados, puis à Vire, dans le département du Calvados. Très vite, il gagne le respect de ses patients et de la population locale, devenant une figure incontournable de la région.
Michel Drucker garde en mémoire un père exigeant, parfois autoritaire, qui n’hésitait pas à le réveiller la nuit pour qu’il révise ses leçons. Une rigueur éducative qu’il partagea avec ses frères, Jean et Jacques, et qui l’a profondément façonné.
« Il me réveillait en pleine nuit pour me faire réciter mes cours », raconte-t-il dans son livre Mais qu’est-ce qu’on va faire de toi ?
Résistant malgré lui, captif malgré tout
Le 28 avril 1942, la vie d’Abraham Drucker bascule. Il est arrêté par la Gestapo. Selon une enquête menée par l’historien Olivier Quéruel, il aurait été dénoncé pour ses liens supposés avec la Résistance, par un membre du Parti populaire français.
Il est d’abord interné à Royallieu, près de Compiègne, avant d’être transféré au camp de Drancy.
Dans une interview accordée à Télé-Loisirs, Michel Drucker évoque avec émotion une coïncidence glaçante : des années plus tard, il effectuera son service militaire… dans cette même caserne de Compiègne.
« C’est là, à Royallieu, que les premiers convois sont partis pour Auschwitz. Et moi, je dormais dans le baraquement qui avait servi d’infirmerie à mon père. Je ne l’ai appris qu’en 2008, lors de l’inauguration du Mémorial de la déportation. »
La libération, le retour à la médecine… jusqu’à la fin
En août 1944, Abraham Drucker est libéré du camp de Drancy. De retour à Vire, il reprend aussitôt son activité de médecin de campagne. Il y exercera jusqu’à son dernier souffle, en 1971. Même affaibli par la maladie, il continue de soigner. Ce fameux accouchement, quelques jours avant sa mort, en est la preuve émouvante.
Un dernier geste de vie pour un homme dévoué à la sienne jusqu’au bout.
« Famille, je vous aime » : un projet intime aux airs d’hommage
Dans cette nouvelle émission, Michel Drucker donne la parole à ceux qui, comme lui, ont été marqués par des histoires familiales fortes. Mais il ne se contente pas d’être un passeur de récits : il partage aussi son propre héritage.
Son père, longtemps resté une figure distante à ses yeux, devient ici un repère, un symbole. Un homme courageux, engagé, discret, mais indéfectiblement présent. Un médecin, un père, un survivant. Un héritage que Michel Drucker choisit aujourd’hui de transmettre à son tour.